Pour l'eau comme pour tous les domaines, la participation du corps citoyen est nécessaire pour imaginer des solutions efficaces et acceptables.

Conseil de Métropole du 12 et 13 décembre 2022

 N° 2022-1403 : 

Rapport sur le prix et la qualité du service public de l’eau potable et de l’assainissement – Année 2021  

Intervention prononcée par Laurence Boffet pour le groupe Métropole en commun

 M. le Président, cher-es collègues,

Un principe simple, déjà vrai au tout début de ce mandat en 2020, présidait au vote de notre assemblée pour la reprise en Régie Publique de l’Eau : l’eau de la Métropole ne devait plus être traitée comme une marchandise, mais comme un bien public, un bien commun vital assorti d’un droit d’accès universel et nécessitant, pour le préserver, des échanges collectifs.

D’avril à juillet 2022, en pleine canicule, nous avons engagé une démarche participative intitulée « Eau Future ». Les quelques 8000 participants à cette expérience commune ont été amenés à s’interroger sur le futur de l’eau, sur l’évolution de nos usages, et sur leurs conflits (d’usage et/ou de captation).

Le fait de partir du point de vue des habitant.es ne devait pas les enfermer dans la réflexion autour des comportements individuels : cette approche visait plutôt à relier ce quotidien à des interdépendances (entre le vivant, les agriculteurs, les industriels, les habitants), questionnant alors la place de chacun.e et les modalités d’arbitrage (quels principes de justice ?).

Le résultat de cette démarche se traduit dans deux rapports : l’un sur l’analyse de perceptions des habitant.es, et l’autre sur la grille de lecture des imaginaires des manières de vivre en 2050 avec moins d’eau. On peut y constater que le sujet de la raréfaction de la ressource en eau, ainsi que la multiplicité de ses répercussions sur nos modes de vie, ont marqué tous les participant.es.

On constate aussi que la salvation par la technologie constitue l’un des imaginaires les plus courants, de même que les comportements individuels attachés à la responsabilité du consommateur. Le gaspillage quantitatif et qualitatif est perçu comme le principal levier sur lequel on peut agir, avec de longs débats sur ce qui constitue un «gâchis».

En revanche, très peu de personnes ont évoqué les marges de manœuvre collective pour agir.

Les participants admettent bien l’idée que la raréfaction entraîne quasi mécaniquement des situations de conflits entre les usagers mais n’ont pas nécessairement idée des proportions de la ressource utilisés par de gros consommateurs comme l’agriculture locale par exemple. De même à la question de la pollution de l’eau, ce sont les industries qui sont identifiées, à contre-courant de la réalité du sujet qui inclut également des difficultés liées à la pollution agricole et aux pollutions domestiques.

Sans doute que cette perception partielle du paysage contribue à l’imaginaire de solutions individuelles plutôt que collectives.

Cependant quelques solutions d’ordre collective sont évoquées par une minorité de participants comme la nécessité d’imposer des quotas, des interdictions, des réglementations. Ces solutions suscitent de la crainte comme de l’adhésion, et pour certains elles sont assorties d’une condition : intégrer les inégalités d’accès et de besoins de chacun. Sont alors cités : Publics en situation de précarité financière, habitants des quartiers très denses, familles nombreuses, femmes enceintes… Les publics vulnérables sont plus nombreux qu’on pourrait le croire.

L’accès à l’eau dans un pays qui n’en manquait pas était cantonné depuis longtemps à un aspect purement technique et financier. Avec la sécheresse, la canicule et la rareté qui se projette, le sujet revient brutalement dans le champ politique au sens où les citoyen-nes ainsi que leurs élu-es doivent s’en emparer.

Comment se saisir collectivement du sujet des conflits d’usage sans stigmatiser les différentes catégories d’acteurs ? Comment faire monter en puissance la question de la qualité de l’eau ? Comment repérer et mieux accompagner les plus vulnérables dans l’accès à l’eau ? Ce sont de grandes questions politiques, au sens noble du terme, et qui ne peuvent être traitées que sous l’angle technique ou financier.

La régie est tout d’abord un outil public destiné à aider, avec les collectivités locales, à traiter les enjeux sur l’Eau de façon démocratique et sociale. Arriverons-nous à re-politiser le sujet et à (re-)mobiliser les énergies collectives au-delà des éco-gestes ou du salut technique ?

Comme pour tous les domaines, la participation du corps citoyen au-delà du mandat des élu.es est nécessaire pour imaginer des solutions efficaces et acceptables. Et c’est aussi cela qui rend indispensable la reprise en main 100% publique de la gestion de l’eau.

Nous voterons, bien entendu, les délibérations affairantes à la Régie Publique de l’Eau.

Je vous remercie.

Groupe Métropole en commun

20 rue du lac

69003 Lyon


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